« Happy New Ears ! » Cette exclamation en forme de jeu de mot lancée par John Cage représente l’apport le plus fondamental de la musique nord-américaine de l’après-guerre à la pensée musicale européenne. C’est en effet à un complet renouvellement de l’écoute que nous invitent la presque totalité des compositeurs présents dans ce numéro de Contrechamps. Et qui dit perception nouvelle, dit aussi vision nouvelle du monde, puisque il devient alors essentiel que « la musique dépasse le cadre de l’exécution du concert », et qu’« elle propose immédiatement son expérience à tout être habité par le seul désir de vivre, d’apprendre et de se renouveler ». (...)Avec cette livraison de Contrechamps, nous n’avons pas cherché à offrir un panorama exhaustif de la musique américaine de ce siècle. D’autres sujets, qui mériteraient un large développement à eux seuls, n’ont pas été abordés ici : le jazz, la recherche en informatique musicale, les jeunes compositeurs, certaines individualités marquantes comme Harry Partch... ; en outre, notre prochain numéro sera consacré à l’un des pères spirituels de la musique américaine, Charles Ives, et à quelques-uns de ses contemporains. Nous avons plutôt tenté d’éclairer, à travers les textes présentés ainsi qu’à travers les « collages » — illustrations de notre propre vision de la musique américaine — une situation souvent trop typée, et de montrer comment les rapports entre le Vieux et le Nouveau Monde se sont articulés dans le courant de ce siècle, et s’articulent encore : le jeu des influences alternées devenant source de richesse culturelle.
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